Poésies II
Poésies II
Le point de départ de cette édition se situe à la Bibliothèque nationale de
France qui conserve – depuis son dépôt légal en 1870 – le seul exemplaire
complet connu de la première édition des Poésies d'Isidore Ducasse en deux
volumes. Cet exemplaire – mythique car unique rescapé d'un tirage réputé de 500
– a suscité beaucoup de passion tout au long de l'histoire et donné lieu à une
succession de copies manuscrites par plusieurs acteurs de la vie littéraire, se
rendant sur place pour recopier l'œuvre en vue d'une diffusion hors les murs.
C'est le cas de Rémy de Gourmont en 1890, de Valery Larbaud en 1913 ou d'André
Breton en 1919 qui, tour à tour, ont porté ce texte à la (re)connaissance du
public.
Bien des décennies plus tard, en mai 2000, Vincent Labaume, alors employé à la
librairie Jean-Claude Vrain à Paris, voit transiter un deuxième jeu complet et
jusque-là inconnu de l'édition originale des Poésies, qui s'apprête à quitter le
territoire suite à son acquisition par un collectionneur étranger. L'exemplaire
qui fait surface possède une plus-value précieuse puisque chacun des deux
fascicules est augmenté d'un envoi autographe de l'auteur à Eugène Loudun,
conservateur honoraire de la bibliothèque de l'Arsenal.
Conscient du caractère exceptionnel de cette réapparition, Vincent Labaume
décide de se saisir subrepticement des précieux volumes pour les photocopier,
directement sur son lieu de travail, avec la machine à disposition. Ce geste
donne lieu à une série de feuillets A4 mobiles sur chacun desquels est
reproduite une page des deux fascicules à échelle 1. Jean-Luc Moulène réalise
ensuite plusieurs prises de vue des photocopies, venant doubler l'acte de
reproduction. L'ensemble constituant le premier volume des Poésies est alors mis
en page, imprimé et plié à la manière d'une feuille d'imposition à déployer,
laissant apparents certains effets visuels dus à la photocopie : marges
tournantes, bougés, biais ou décalages. Cette reconstitution présente un
ensemble homogène porté tant par l'éventail des gris créé par la technique de la
photocopie, que par le dévoilement des ficelles du façonnage, tous au service du
texte de Ducasse, restitué dans une beauté sobre.
Cette même année 2000, la conservatrice du musée d'Art moderne de la Ville de
Paris, Suzanne Pagé, choisit d'intégrer la pièce à l'exposition « VOILÀ, le
monde dans la tête », en faisant imprimer plusieurs milliers d'exemplaires de
l'affiche, mise à la disposition gratuite du public. On oppose alors une
dispersion libre et généreuse, à l'extrême confidentialité de cette édition dont
l'exemplaire de la BnF constitue la matrice.
25 ans après, les Éditions Lorem Ipsum et Incertain Sens s'associent pour
publier le volume II des Poésies dont le lot de photocopies n'a jusque-là pas
été exploité. Part manquante de l'ouvrage, ce second volume a lui aussi
bénéficié d'un principe de double reproduction préférant cette fois – dans une
perspective de documentation – le scan des photocopies initial
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