Immatériel
Immatériel
Calfeutré dans l’atmosphère moite de son appartement, un homme nu est avachi
devant sa télévision. Les sacs poubelles jonchent le sol, les objets
s’accumulent, l’espace se rétrécit. Seul sur son îlot de déchets, l’homme semble
coupé du monde depuis une éternité. Mais voilà qu’un matin, il disparaît pour de
bon... Quelques semaines plus tard, une équipe de nettoyage est envoyée sur
place pour vider les lieux. Parmi les agents, Adel, effectue son premier jour
dans l’entreprise. Très vite, le jeune homme ne peut s’empêcher de s’interroger
sur les raisons qui ont poussé le dernier locataire à un tel isolement. Une
curiosité imprudente qui l’amène à s’identifier dangereusement au mystérieux
occupant.
Dans cette bande dessinée, Jérôme Dubois s’intéresse au phénomène hikikomori, un
état psychologique qui pousse certaines personnes à vivre cloîtrées dans leur
chambre pendant des mois, voire des années. Ce point de départ sert de socle
pour questionner notre rapport aux présences invisibles et à la mémoire des
lieux. La gamme chromatique du livre, faite de rouge/vert/bleu, accentue ce jeu
entre espace intérieur et extérieur en convoquant un regard sur le monde qui ne
passe que par les écrans. De l’ensemble naît une atmosphère aussi lumineuse que
pesante, presque irréelle, à l’image du fantôme par les yeux duquel nous suivons
une partie de l’histoire.
Jérôme Dubois signe avec Immatériel une œuvre somptueuse et métaphysique en
réussissant le pari osé de mettre des images et des mots sur l’invisible.
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