La Gloire de la bêtise
La Gloire de la bêtise
Depuis la fin des années 1980 se sont épanouies des pratiques artistiques qui
font le choix de la bêtise délibérée, de la régression ou de la superficialité.
La triade de l'altérité moderne, que représentaient le fou, l'enfant et le
primitif, est alors supplantée par la figure de l'adolescent bête. Tantôt
critique, tantôt complice, cet art s'est frayé un chemin dans les galeries, les
magazines, les biennales et jusque dans les plus importantes collections privées
devenues muséales, dont celles de Dakis Joannou, de François Pinault ou d'Eli
Broad.
Martin Kippenberger, Wim Delvoye, les YBA, Paul McCarthy, Mike Kelley, Gelitin…
ou bien encore Dumb & Dumber au cinéma ou Beavis & Butt-Head et Jackass à la
télévision : le succès de la bêtise compulsive est éclatant. Les cultures
propres à l'adolescence deviennent le lieu d'une fixation, d'un refus d'accéder
à l'univers normé de la culture « adulte » en se ménageant des espaces de répit
hors du monde des responsabilités sociales. Au plus fort de la vague
néolibérale, l'avenir est pour beaucoup source d'angoisse – et la régression, un
refuge.
Dans une approche ancrée à la fois dans l'histoire (culturelle) et la théorie
(esthétique), Morgan Labar tente ici de comprendre ce qui a fondé ces pratiques
artistiques et imposé leur légitimité nouvelle. Naviguant à vue entre Jeff Koons
et Présence Panchounette, Alerte à Malibou et Adorno, les Ramones et Walt
Disney, cet ouvrage fait l'analyse d'un phénomène historique inédit par son
ampleur – le mouvement des marges au feu des projecteurs, par lequel la bêtise a
parfois perdu sa dimension critique et son caractère subversif pour devenir
l'une des logiques culturelles de l'époque.
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